Monday, August 07, 2006

Oui au Liban, non au Hezbollah!

Je ne peux pas blâmer les pauvres simples d'esprit, fanatisés par le charisme de sayyed Hassan Nasrallah, mais j'espère que mes arguments parviendront aux autres, les gens avec tant soit peu de bon sens, qui sauront distinguer, dans cette situation trouble, les vrais intérêts du Liban...
L'affirmation que la guérilla est plus efficace qu'une armée régulière, dont se servent les porte-parole et les défenseurs du Hezb pour justifier la persistance de leur armement, n'est qu'un sophisme grossier. Le Hezb affirme que le plus grand atout de la guérilla est son secret, personne ne peut prévoir ses mouvements. Mais les armées régulières ne mènent-elles pas des opérations secrètes? N'ont elles pas des armes, des bases, des unités secrètes? Secundo, ils affirment que si l'Etat est « impliqué » dans une offensive, c'est tout le pays qui paie le prix, alors que si c'est uniquement la « Résistance » qui agit, l'ennemi n'attaque pas: je pense que les évènements de ce dernier mois ont largement démenti ce postulat... Tertio, le Hezb affirme que ses missiles sont une mesure « dissuasive » contre l'ennemi Sioniste: à supposer que cela soit vrai - bien que cela ait encore été démenti par les dernières attaques - je vois mal comment ils le seraient moins aux mains expertes de l'armée libanaise, qui disposerait ainsi d'un arsenal plus large, complémentaire aux roquettes, et qui en ferait par conséquent meilleur usage... Ces quelques pseudo-avantages étant donc très discutables (pour ne pas dire complètement faux), voyons donc ce que nous perdons à avoir une milice armée sur notre territoire:
1- Absence totale de crédibilité aux yeux des nations unies: l'Etat Libanais est incapable de faire respecter la loi sur son propre territoire. Et par conséquent accueil méfiant réservé au passeport libanais partout dans le monde, réputation d'Etat voyou...
2- Imprévisibilité des actions militaires de cette milice; l'armée libanaise suit les ordres de son ministre de la Défense et ceux de son propre parlement, suivant une hiérarchie savamment étudiée, et oeuvre donc au bien-être de son peuple, mais QUI ordonne les agissements du « parti de Dieu »? Dieu lui-même peut-être??
3- Instabilité intérieure, et spectre menaçant d'une éventuelle guerre civile. La milice armée appartenant majoritairement à une seule confession, le risque d'un conflit intérieur reste présent tant qu'il existe des armes en dehors du contrôle de l'Etat.
4- Intérêts personnels (ou théologiques, ou fascistes) prévalant sur l'intérêt de la nation, à savoir la préservation des vies humaines, des infrastructures, de l'économie ... Pour défendre la « cause arabe » (bien que la Ligue Arabe ne leur ait rien demandé) ou « l'honneur de l'Islam » (bien que l'Arabie Saoudite ne les ait pas mandatés), les miliciens du Hezb prennent l'initiative de franchir la ligne bleue, tuer 8 soldats de l'ennemi et en kidnapper 2 autres. Nous avons tous eu l'occasion de vérifier que cela n'était pas dans l'intérêt du Liban...
Se voyant battus dans un discours clairvoyant, les pro-Hezb se rabattent alors, pour redresser la situation, à vous accuser de lâcheté, de suivisme américain, de nostalgie du Mandat Français, de phalangisme, et j'en passe... Les valeurs qu'ils invoquent, copiées sur le dernier discours télévisé du Sayyed, sont le « courage face au martyr », la « virilité », l'« honnêteté » etc., vertus tout à fait louables en littérature et en poésie, mais absolument stériles -voire dangereuse- dans un discours politique. Ce à quoi je réponds que le Liban est un pays démocratique, et que si vous voulez expérimenter le martyr, faites-le, vous avez ma bénédiction, mais de grâce ne m'entraînez pas dans votre mort « héroïque »... Je préfère choisir la vie, l'économie, la paix, et le pardon des erreurs du passé...
P.S.: Dans ce discours où j'ai été plus que dur envers les sympathisants du Hezb, je tiens cependant à affirmer mon amour à l'ensemble du peuple chi'ite (en particulier à mon ami M.S.), et ma grande admiration devant leur courage et leur foi.

8 Comments:

Anonymous Anonymous said...

al mawtou li amrika,
al mawtou li di gaulle

8:20 AM  
Anonymous Anonymous said...

"l'armée libanaise suit les ordres de son ministre de la Défense [...] et oeuvre donc au bien-être de son peuple, mais QUI ordonne les agissements du « parti de Dieu »? Dieu lui-même peut-être??"

Dans le dernier discours télévisé de CHN ce dernier répond à la question que vous posez.
Dans son argumentation, il commence par affirmer que s'il savait que le kidnapping des 2 soldats israéliens allait provoquer cette guerre il y aurait certainement renoncé. Il affirme ensuite qu'il avait compris plus tard (quelques jours après le début de la guerre) que le kidnapping n'était qu'un prétexte et que le gouvernement israélien avait décidé de lancer une offensive contre le hezb en septembre. Il continue : "Si tel avait été le cas, ils (les israéliens) auraient bénéficié de 2 facteurs aggravants ; une meilleure préparation de leurs militaires ainsi que l'effet de surprise.
Il conclut en affirmant que pour un croyant comme lui, il est normal de voir dans ce timing la preuve d'une intervention divine qui a permi de limiter les conséquences de la guerre.


Au moins c'est clair : pour CHN c'est bien dieu qui décide !

5:31 AM  
Blogger Oberon Brown said...

Anonymous,
C'est bien vrai ce que vous dites, mais il n'empêche que l'ensemble de la conduite du Hezbollah pendant ces 6 années, ses provocations incessantes, son discours agressif, allaient immanquablement nous conduire à la guerre; une guerre qui ne nous sert à rien.

11:48 PM  
Anonymous Anonymous said...

Tout à fait d'accord Oberon et si le texte n'a pas bien fait ressortir le fait que je désapprouve complètement cette prétention qu'ont les religieux de décider pour nous de notre bonheur en nous envoyant à la boucherie, j'ajouterais ce qui suit :

Toutes les guerres faites au nom des dieux n'ont jamais apporté que le malheur pour les humains.

La démocratie ne peut réellement s'établir dans un pays que lorsque c'est l'être humain qui est le centre d'intêret de la politique et non pas la pseudo volonté de dieu révélée par tel cheikh ou patriarche autodécrétés infaillibles.

12:38 AM  
Anonymous Anonymous said...

Cher Oberon,

Tout ce que tu dis est vrai et plus que convaincant.
Mais il y manque le cœur.

Je ne suis pas simple d'esprit, loin de là, et encore moins fanatisée par le charisme de Sayyed
Hassan Nasrallah.

Cependant, je ne fais pas partie de ceux qui pérorent à voix haute, dans les pubs et les salons, et qui vilipendent à qui mieux mieux ces "fanatiques" "qui, au mieux, ont foutu le pays en l'air, ont sapé la saison touristique et nous ont empêchés de profiter de la saison estivale... et au pire veulent "islamiser" le pays et nous bouter, nous autres chrétiens, en dehors du pays du Cèdre...
L'idéologie, je ne la discuterai pas. Les chemins du Seigneur sont impénétrables... Certains font le pèlerinage de la Mecque, d'autres celui de Jérusalem, d'autres enfin celui de Sednaya, de Saint Jacques de Compostelle ou de Medjugorje... d'autres encore choisissent la voie, pour eux royale, du martyr... Pour retrouver leur honneur perdu, ceux "qui ont perdu la face" pratiquent le crime d'honneur, se font "hara-kiri" ou alors chair à canon, pour trouver dans l'au-delà la dignité ou l'honneur qu'ils ont perdus de leur vivant.

Le discours des religieux, quel que soit leur bord, ne m'a jamais interpellée, et je ne laisserai à personne, fut-il représentant de Dieu sur terre, le soin de diriger ma vie. Et donc à priori, le "charisme" de Sayyed Hassan Nasrallah est, pour moi, absolument inopérant.

Mais je suis de ceux qui ne jetteraient pas la pierre au Hezbollah, et je ne m'en cache pas.
Un psy très très compétent et très très doué dirait que je vis, en tant que mère, un syndrome de "culpabilisation". Je ne peux m'empêcher de penser à ces cas terribles dont nous entendons parler tous les jours, ces cas d'enfants maltraités, sous-alimentés, exploités, abusés, souvent battus à mort par des "parents indignes" qui, on ne sait pour quelle obscure raison, préfèrent un enfant à un autre, ou pire, font de l'un ou de l'autre une sorte de souffre-douleur qui va expier à leur place toute la rancoeur et la frustration qu'ils nourrissent en eux. Quand ils ne meurent pas, ces enfants, devenus adultes, finissent souvent dans la délinquance, parfois aussi devant un tribunal qui va les juger pour leurs "crimes", crimes qu'un habile avocat de la défense va se charger de réduire autant que possible en invoquant ce qu'on appelle les "circonstances atténuantes".
Et le Hezbollah en fait partie.

Ziad Karkour a écrit dans l'OJ du 12/08/06 un vibrant plaidoyer pour le Liban-Sud, un texte tout en clarté, en intelligence, et surtout en sensibilité, cette qualité qu'il n'est plus de bon aloi d'éprouver, ni même "politiquement correct" d'afficher. Il y parle de pardon, d'amour (sait-on encore ce que cela signifie?) et nous demande humblement à nous Libanais, tous tant que nous sommes, à reconnaître ce "vilain petit canard" qui n'a pas fait partie de notre famille.

Il nous montre (et il n'y de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir) que les "choix incendiaires" du Sud sont aussi et surtout de notre responsabilité.

Merci Ziad pour cet "acte de contrition" comme tu l'appelles, cette prière sacrée qui ne fait pas partie de notre catéchisme, et merci de m'autoriser à publier ces quelques extraits.

"Devant ce guet-apens étourdissant que nous avons mal à assimiler, le temps est sans doue venu mon Sud de te dire les vérités comme elles sont. Le temps est venu mon Sud de te faire ici et en public notre acte de contrition au nom de tous les libanais. Le temps est venu mon Sud de te demander pardon au nom de l'Etat libanais. Car en vérité je te le dis, son affection n'a jamais été que désaffection, sa mission envers toi n'était que démission, son abnégation pour toi était dénégation."

"Au nom de l'Etat libanais que je ne représente que le temps de rédiger ces quelques lignes, pardon mon Sud pour t'avoir ignoré depuis des décennies, depuis trop longtemps, depuis toujours".

"Pardon de t'avoir spolié, de t'avoir laissé patauger dans la misère si souvent, d'avoir laissé tes fils trépigner dans l'ignorance et le dénuement".

"Pardon pour avoir écarté tes enfants du progrès et de la prospérité et de s'être étonné ensuite des choix suicidaires qu'ils ont embrassés".

"Pardon de t'avoir caché que le slogan des 10452 Km² n'a jamais effectivement jamais mesuré plus que la moitié".

"Pardon d'avoir remis au pouvoir tous ceux qui pendant de longues années ont pillé et gaspillé sans vergogne les fonds qui t'étaient destinés".

"Pardon de t'avoir cédé en laissant à un autre état lointain le soin de t'allouer un budget spécifique et de t'assigner tout un programme politique, économique et social".

"Pardon d'avoir ignoré les paroles de ce grand Imam Moussa el Sadr qui nous prévenait que quand le Sud va mal, le Liban tout entier ira mal".

"Pardon mon Sud d'avoir cru trop tôt à ce grand mirage de la fin de la guerre qu'ils nous ont fait vivre en 1990".

"Pardon d'avoir été cet état cigale qui dépensait sans compter pour construire des palais de verre sur des fondations d'argile".

"Pardon pour ce Liban village de vacances où la musique sonnait tellement haut qu'on n'entendait pas les geignements des démunis qui résistaient dans tes villages".

"Pardon pour ce Liban narguilé où le ronronnement du plaisir couvrait le crépitement des flammes qui couvaient sous tes cendres".

"Pardon car l'éclat du Centre Ville étincelant nous a caché les strates des autres Beyrouth qui témoignaient de sa vulnérabilité".

"Pardon de ne pas avoir compris que le flambant neuf pouvait nous aveugler au point de très vite devenir flambant tout court".

"Pire que la démission de l'Etat qui dure depuis sa genèse, ton drame, mon Sud, nous montre le manque effarant d'hommes d'Etat. Pardon pour le néant au sommet de nos institutions. Pardon pour l'absence d'hommes à la hauteur de la circonstance".

"Au Liban, mon Sud, il n'y a pas que des Mozart qu'on assassine, il y a des De Gaulle qu'on exile, des Bismarck qu'on bannit, des Havel qu'on ignore ".

5:34 AM  
Blogger Oberon Brown said...

Chère Siguiriya,
Comme d'habitude, vous arrivez à pointer du doigt la faille dans un discours que je croyais pourtant irréprochable: il est vrai que le facteur humain y est totalement absent, et que j'occulte un point (très éloquemment exprimé d'ailleurs dans l'article de Ziad Karkour que vous relevez) essentiel à la compréhension des faits: c'est que le Sud souffre... J'ai pour excuse que je suis une personne froide, et la raison passe toujours chez moi avant le sentiment.
Oui, les habitants du Sud sont pauvres, délaissés, mal remis de l'occupation: le Hezbollah est le seul Etat valable, le seul à avoir pris soin d'eux, le seul à être là. La Syrie a fait pour eux beaucoup plus que ce que nous n'avons jamais fait, d'où cette manifestation de « gratitude » envers la Syrie, le 8 mars 2005, attitude qui avait accentué encore plus le déchirement national. L'Etat Libanais paie le prix de sa négligence. C'est vrai...
Mais, (et pour revenir à la raison) bien que l'attachement du peuple à cette milice soit tout à fait compréhensible, la situation du Hezbollah n'en reste pas moins irrégulière: il ne peut pas y avoir un mini-Etat à l'intérieur d'un autre! Cela est, par définition, une source de problèmes, pour utiliser un euphémisme: c'est en fait une bombe à retardement, une boîte de Pandore.

3:38 AM  
Anonymous Anonymous said...

Juste une petite reflexion concernant la "situation" "irrégulière" du Hezbollah: Si "bombe à retardement" peut s'avérer légitime, pourquoi utiliser l'expression boite de Pandore? La boite de Pandore contenait tous les maux de l'humanité, dont la vieillesse, la maladie, le travail, la folie, le vice, la tromperie, la passion... Ce serait exagéré d'attribuer ces maux au Hezbollah! J'aurais à ta place plutôt utilisé l'expression "Epée de Damoclès"... Non?

2:52 PM  
Blogger Oberon Brown said...

Non, car l' "Epée de Damoclès" exprime une menace éventuelle, et donc la possibilité que le mal n'arrive pas, alors que la présence armée du Hezbollah ouvrira CERTAINEMENT la porte à toutes sortes d'ennuis possibles. Donc, pour bien exprimer mon point de vue, je m'en tiens à la boîte de Pandore :)

2:54 AM  

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