Le grand handicap du mouvement aouniste: Aoun!
Je n'insisterai pas sur les crises de colère du personnage, et ses cris pour ramener l'ordre dans la salle, qu'il servit en guise de remerciements à toutes les personnes venues lui souhaiter la bienvenue à l'aéroport. Finalement, chacun a sa façon d'exprimer sa gratitude et sa joie. J'évoquerai juste cette phrase de son premier discours de retour, une phrase dont je me rappelle très bien car elle sonne fort dans l'oreille comme une insulte:
« La mort de Hariri a accéléré le processus de libération que nous avons entrepris »...
Est-il possible de dire une chose pareille? Cela faisait à peine quelques mois qu'un grand citoyen Libanais était mort (c'était presque l'équivalent d'un Bachir Gemayel), et c'est avec cette légèreté, cette absence totale de décence humaine qu'il parle de l'évènement? Lorsque je pose la question à un ami CPL, sa réponse est en général:
- « Euh!... Oui, c'est parce que les autres ne sont pas venus le recevoir à l'aéroport. »
C'est d'ailleurs le même argument que tous les Aounistes vous servent, dès que vous questionnez une position un peu discutable – et il y en a plein!- prise par leur général :
« Oui, il y a été contraint !»
« Oui, il a fait ça parce que les autres ont fait cela !»
« Oui, mais les autres ne sont pas mieux! »
etc...
Pour se résumer donc, Michel Aoun commet toutes les bêtises possibles et imaginables en réponse aux provocations des autres! Si la plupart des gens agissent en fonction de leurs principes, lui il « réagit » aux actions des autres. Ainsi, dans un pays qui vient de se libérer d'une longue tutelle syrienne, le général (retraité) s'arrange pour se mettre tous les Pro-Syriens de son côté (Suleiman Franjié, Michel Murr, Talal Erslan...) avec pour seule justification:
« Oui, ils sont venus à nous, je n'allais pas leur dire non »...
Quel argument stupide! Lorsqu'on s'allie avec quelqu'un, c'est que nos objectifs sont similaires: s'il n'existe pas de base commune, c'est que nous sommes naturellement dans deux camps opposés!
Le pays s'est donc divisé grossièrement en deux camps: les anti-Syriens d'un côté, regroupant le Parti Socialiste de Joumblat, le Courant du Futur de Hariri, les Forces Libanaises, les Ahrar, etc.., et les pro-Syriens de l'autre, Hezbollah, Amal, Suleiman Franjié, et autres sympathisants syriens... Le CPL lui, pourtant l'un des premiers artisans de cette libération, se retrouve en dehors de cette classification. Le journal Le Monde le qualifie d' « atypique ».
Récemment, les jeunes du Tayyar ne savent plus à quelle manifestation participer: des fois se trompant de camp, ils se retrouvent à vandaliser l'ESCWA avec des drapeaux du Hezbollah, ne sachant plus d'ailleurs s'ils sont pour ou contre les armes de ce dernier... Certains aounistes, visiblement embarrassés par ce chef fatigant et indéfendable (sauf par le stratagème cité plus haut), renoncent sagement à toute discussion politique, et se consacrent plutôt à des actions sociales, extrèmement généreuses et louables. D'autres supposant qu'ils sont déjà passés dans l'axe Irano-Syrien, essaient de se convaincre (et de convaincre les autres) combien sont beaux les pays comme l'Iran, Cuba, la Corée du Nord, ces vaillants résistants qui fuient la satanique influence US; combien ces régimes, favorisant l'épanouissement personnel, la liberté d'expression, la motivation économique, sont forcés de rejeter par milliers les immigrants européens et américains, qui accourent chaque jour avidement vers leurs frontières...
Finalement, la morale de cette histoire c'est qu'il faut toujours, en tant que partisan de telle ou telle autre mouvance politique, remettre en question les décisions de son chef de file (surtout quand il s'agit d'un gnome névrosé et imprévisible), s'interroger sans cesse si notre démarche est en adéquation avec nos principes fondateurs, si elle n'est pas en train de nous éloigner du véritable but que nous poursuivons, et s'assurer enfin que ce but est toujours en vigueur! Car dans la politique (et dans la vie en général), il est souvent utile de savoir où l'on va...